Enquête : Des arbres dans ma ville

Les arbres en ville, la plan­ta­tion de ces “puits de car­bone” en milieu urbain a par­ti­c­ulière­ment le vent en poupe, notam­ment depuis l’accord de Paris de 2015 sur le cli­mat. Pour autant, elle n’est pas tou­jours réal­isée de façon durable et effi­cace.

par | 8 mars 2023

Arbres en ville : bien­faits et enjeux

Par Léa Gar­son.


Savez-vous planter des arbres, à la mode, à la mode… des enjeux écologiques ? La plan­ta­tion de ces “puits de car­bone” en milieu urbain a par­ti­c­ulière­ment le vent en poupe. Notam­ment depuis l’accord de Paris de 2015 sur le cli­mat. Pour autant, elle n’est pas tou­jours réal­isée de façon durable et effi­cace. Sur l’espace pub­lic (comme privé), dif­férents principes et con­traintes sont à pren­dre en compte. Voici un mode d’emploi pour que cha­cun puisse faire pouss­er des arbres dans sa ville (ou ailleurs), et même, pourquoi pas, des micro-forêts…

1puit de car­bone : organ­isme capa­ble de stock­er le CO2. Chaque année, les forêts français­es absorbent env­i­ron 70 mil­lions de tonnes équiv­a­lent CO2.

Tous les bienfaits des arbres en ville

En par­al­lèle de l’artificialisation mas­sive du ter­ri­toire – l’équivalent d’un stade de foot­ball est béton­né toutes les cinq min­utes –, on voit désor­mais fleurir de nom­breux pro­jets de (re)végétalisation des villes. Des potagers sur les trot­toirs, des fleurs aux pieds des lam­padaires, des arbres fruitiers dans les ronds-points… et main­tenant des micro-forêts urbaines. S’agirait-il de recréer des espaces verts pour la prom­e­nade du dimanche ? Sûre­ment, mais pas que. Car les ser­vices ren­dus par les arbres sont mul­ti­ples. Leur présence en ville pour­rait bien être vitale dans les années à venir. 

Arbres en ville

Les contraintes du milieu urbain 

Au moment d’introduire des arbres en ville, il faut toute­fois pren­dre en compte cer­taines con­sid­éra­tions. Le développe­ment d’un arbre en milieu urbain est dif­férent de celui d’un arbre en milieu naturel. Les con­di­tions citadines sont plus hos­tiles. Pol­lu­tion, tem­péra­tures plus élevées, terre moins riche et plus com­pacte (vol­ume sou­vent insuff­isant pour le développe­ment des racines), lumi­nosité réduite à cause de la hau­teur des bâti­ments, sol imper­méable et sec, etc. Les inter­ven­tions humaines, comme notam­ment l’entretien de la voirie, peu­vent avoir des impacts nocifs voire fatals sur les arbres si elles ne sont pas bien réal­isées.

Les racines sont une don­née impor­tante à pren­dre en compte dans la déter­mi­na­tion des espèces à planter, afin d’éviter les dégâts sur les réseaux (de cir­cu­la­tion, d’eau, de gaz ou encore d’électricité).

Le car­ac­tère aller­gisant des arbres est égale­ment un fac­teur impor­tant pour le choix des espèces à planter.

Enfin, la présence d’arbres en zone urbaine implique plusieurs types de presta­tions régulières, dont le coût est à anticiper. Arrosage, ancrage souter­rain et/ou aérien (à l’aide de tuteurs ou de liens), con­trôles des pieds (pour véri­fi­er qu’ils ne soient pas endom­magés), renou­velle­ment des pail­lis et autres cou­ver­tures de sols, taille (en par­ti­c­uli­er lors de la for­ma­tion des arbres), etc. Pour min­imiser l’impact financier, il faut priv­ilégi­er les espèces indigènes (naturelle­ment présentes sur le ter­ri­toire) – plutôt que l’éternel pla­tane ou cyprès –, car elles sont mieux adap­tées au sol, ain­si qu’au cli­mat local, et plus résis­tantes aux mal­adies. Elles deman­dent donc moins de soins et leurs racines sont plus pro­fondes, ce qui les rend aus­si plus sta­bles en cas de con­di­tions envi­ron­nemen­tales extrêmes. De plus, en offrant nour­ri­t­ure et habi­tat à la faune locale, elles ren­for­cent l’ensemble d’un écosys­tème qui aura ten­dance à s’équilibrer plus facile­ment (recom­man­da­tion qui vaut aus­si pour les jardins !).

Arbres en ville

Bien choisir les essences à planter 

Les guides des essences à planter pro­posés par les insti­tu­tions français­es sont rarement exhaus­tifs et met­tent plutôt en avant les espèces économique­ment intéres­santes (notam­ment pour l’exploitation forestière). Afin de con­naître la liste des espèces indigènes de votre ter­ri­toire, vous pou­vez con­tac­ter les réserves naturelles, ain­si que les parcs nationaux et régionaux, qui générale­ment les réper­to­ri­ent, ou vous rap­procher d’un botaniste.

Pour Hervé Caroff, respon­s­able du pôle forêt du parc nation­al des Cévennes, la meilleure chose à faire est de regarder ce qui pousse dans les espaces sauvages alen­tours. Au sein d’une même région, comme l’Occitanie par exem­ple, il peut y avoir des dif­férences en ter­mes de sol, cli­mat, alti­tude, expo­si­tion, etc. et donc d’essences présentes. 

Exem­ple d’espèces présentes en Cévennes, établi avec le parc nation­al : 

  • Basse alti­tude (cli­mat méditer­ranéen) : arbousi­er, bouleau ver­ruqueux, chêne blanc, chêne vert, cormi­er, frêne à fleurs, érable à feuille d’o­bier, érable cham­pêtre, érable de Mont­pel­li­er, frêne oxy­phylle, merisi­er, noiseti­er, noy­er com­mun (sou­vent isolé), pin mar­itime, pin para­sol, pin de Salz­mann, saule marsault, tilleul à grandes feuilles, trem­ble
  • Haute alti­tude (cli­mat mon­tag­nard, à par­tir de 1000 mètres d’altitude env­i­ron) : alisi­er blanc, bouleau ver­ruqueux, érable plane, érable syco­more, frêne com­mun, hêtre com­mun, merisi­er, orme de mon­tagne, sapin pect­iné, saule marsault, sor­bier des oise­leurs, tilleul à grandes feuilles, trem­ble
  • Entre les deux : on observe d’autres essences comme l’alisier tormi­nal, le châ­taig­nier, le pin sylvestre, le poiri­er com­mun ou encore le pom­mi­er com­mun.

Plusieurs arbres allochtones (provenant d’ailleurs) ont été intro­duits dans les forêts français­es, c’est pourquoi on en trou­ve égale­ment au sein des Cévennes : épicéas, dou­glas, pins noirs d’Autriche ou encore mélèzes. Si ces espèces sont aujourd’hui bien inté­grées, d’autres sont à éviter en France, car elles peu­vent vite devenir envahissantes. C’est le cas du robinier dit “faux aca­cia” (car il n’y a pas d’acacia en France), de l’ailanthe ou encore de l’érable negun­do. Pour préserv­er la bio­di­ver­sité, il est par­fois même inter­dit de bois­er des espaces ouverts (sou­vent lorsqu’il y a déjà pas mal de forêts autour).

Les limites de la gestion conventionnelle

Sur le plan poli­tique, l’arbre peut vite devenir le com­pen­satoire des émis­sions car­bones et éviter les remis­es en ques­tion visant à les faire dimin­uer. Côté écolo­gie, en France, la ges­tion arbori­cole est plus proche de la mono­cul­ture que de la diver­sité naturelle. L’aspect durable n’est donc pas tou­jours assuré : pour exem­ple, plus d’un quart des pla­tanes entourant le Canal du Midi (soit 42 000 arbres !) ont été vic­times du chan­cre col­oré, champignon arrivé des États-Unis en 2006. Tous con­damnés, la plu­part d’entre eux ont été abat­tus. Les pla­tanes (très pop­u­laires sur notre ter­ri­toire) n’abritent d’ailleurs que deux espèces d’insectes, tan­dis que les chênes, par exem­ple, en accueil­lent plusieurs cen­taines. Pour ne rien arranger, ils font par­tie des espèces qui rejet­tent des com­posés chim­iques volatils, accen­tu­ant la pol­lu­tion de nos activ­ités durant les pics de chaleur. 

La présence d’arbres peut ain­si s’avérer con­tre-pro­duc­tive, d’autant plus lorsqu’elle va de pair avec l’utilisation d’engrais azotés et autres intrants chim­iques qui détru­isent les sols et les cours d’eau et dont la nociv­ité pour les humains et autres êtres-vivants est désor­mais avérée.

Si planter des arbres reste un moyen plutôt sim­ple de végé­talis­er les villes, il est préférable d’opter pour une meilleure diver­sité des essences, ain­si qu’une ges­tion plus con­sciente des enjeux liés aux arbres.

Arbres en ville

Arti­cle issu du Numéro 3 – Automne 2020 – “Partager”

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